Diplômée en Arts-plastiques de l'Institut des Arts de l'Univ. de Picardie Jules Verne.
A coté de ma pratique artistique j'expérimente depuis 2019 le dispositif d'animation, Enfants & Livre d'artiste.
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Installée à l'été 2024 aux Ateliers de la VIlle-en-Bois, visite sur rdv. Résidente 2020-24 du Collectif Bonus, ateliers d’artistes de la Ville de Nantes.
Vit à Nantes depuis 2018.
« Caroline Bron développe une poésie aussi plastique que textuelle. Avec titre présente une série de portraits de femmes dessinées par le peintre Sir David Wilkie.
Prisonnières d’un regard, celui d’un homme venu découvrir l’orient au milieu du XIXe siècle, ces femmes deviennent une représentation, entre fantasme et projection. Cachées sous une description elles acquirent le rôle que leur attribue le peintre : « l’espagnol », « la fille », « la mère gitane », « la chasseuse de rat ». Sir David Wilkie écrira que, confronté au voile ou au harem, le peintre ne bénéficie pas de la même liberté créatrice que les auteurs *.
Par un geste, une application, Caroline Bron efface d’un épais nuage l’image, pour n’en conserver que des bribes. Le plâtre, gazeux et effervescent s’étend sur l’image et opère un cut up visuel, un caviardage aussi crémeux et onctueux que compact qui invite à « enflammer l’imaginaire » pour reprendre les mots du peintre britannique. Libérées des représentations qui pesaient sur elles, les femmes s’effacent et leur invisibilité apparait. »
Emilie Le Guellaut, juin 2023
(*) « Comme sujet de description ou de récit poétique, on trouverait des moyens d’enflammer l’imagination avec la forme et la suite des événements à peine entrevus ; mais pour nous, que peut-on faire pour peindre un visage que l’on n’a pas vu, ou avec des héros et des héroïnes qu’on ne peut décemment montrer sur le même tableau ? » Allan Cunningham, The Life of Sir David Wilkie: With His Journals, Tours, and Critical Remarks on Works of Art : and a Selection From his Correspondence, op. cit., p. 342
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« Les mots sont très présents dans le travail de Caroline Bron et y endossent plusieurs statuts. Qu’ils soient issus d’écritures libres demandées à des connaissances, de textes poétiques ou de ceux écrits au dos d’une carte de vacances, discrètement, l’artiste réactive ces paroles perdues ou censurées dans ses performances et ses sculptures.
Pourtant, les phrases citées sont rarement totalement lisibles : l’artiste ne restitue pas des idées, elle rend leur existence manifeste. Devenues objets, mises en sculptures, elles surgissent par bribes, investissent l’espace en nuées et en fils immenses, comme suggérant leur lecture empêchée. La mémoire et l’oubli irriguent son travail. S’il est le plus souvent en noir et blanc, c’est pour mieux évoquer la dualité du souvenir, à la fois présence et disparition. La plupart du temps, ses pièces prennent pour point de départ une forme, trouvée, dont elle effectue un moulage ou un recouvrement avec du plâtre. Ces traces de vécu, auxquelles on ne prête plus tellement attention, perdues dans les méandres du temps et sous l’accumulation des objets, deviennent entre ses mains des supports narratifs.
Au sein de cet univers fictionnel, le plâtre est le matériau de prédilection. Utilisé aussi bien par les artistes que par les archéologues, il renvoie à l’empreinte, notion qui traverse la pratique de Caroline Bron. Il permet d’inventorier les formes mais aussi de les combiner pour créer nouveaux sens ou anachronismes. Aussi figé que fragile, il est l’agent d’une muséification précaire. Il préserve sa forme et son existence mais peut s’émietter à tout moment. A moins que l’objet qu’il renferme n’ait déjà disparu ? Car le plâtre matérialise, aussi, le passage du temps. Il témoigne de son modèle autant qu’il en révèle l’absence.
Par ses actions de préservation ou d’altération, Caroline Bron souligne à la fois la menace permanente de la perte et l’infinité des existences possibles. »
Pascaline Vallée
Les mots existent, 2022 (extrait)
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« Ôter toute perfection, geste juste, Caroline Bron est de ces artistes qui manipulent, font action de la main, assemblent. Dans le plâtre, elle emprunte à l'empreinte, le fait d'empreindre les sentiments et donne à voir, ce que l'on ne pouvait plus voir. Ces objets du banal, de l'inaperçu, plus encore du jetable, éructent leurs vices : une production sérielle, vidé de contenu. Pourtant, quand l'artiste les fige par procédé technique, ils se révèlent, bien plus positifs que négatifs.
Ces objets sont à l'image de la série 'Nous espérons que vous allez bien' et '198 rue des fougères', des enveloppes administratives reconstituées. Moyens de transport terne, il faut attendre que le pouce de l'artiste vienne ouvrir les étroites fenêtres pour dévoiler les paysages disparus. La carte ainsi montrée rappelle que le geste révélateur est insuffisant pour atteindre l'être contenant. Au dos les mots souvenirs ne seront peut être plus jamais lus.
On continue de promener notre regard avec plus d'attention, sur cette succession d'objets. Sur des feuilles plâtrées, la forme presque informe porte des mots composés. Violents, crus, ils sont parvenus à passer l'épreuve du temps. Leurs auteur.es, des femmes de la Beat Generation. Ces morceaux de poèmes choisis par l'artiste, questionnent nos cultures underground. Dans les marges, des espaces souterrains, qui contiennent leur lot de délaissées : cette fois se sont les femmes, les rejetées, les invisibilisé(e)s.
Et puis, on pousse un peu plus le jeu de l'intellect rétinien, car de tous ses plâtres à paraître, au fond des surfaces blanchies et irrégulières, la lumière toujours trouve quelque part aspérités pour s'accrocher. Certes les objets appauvris de leurs fonctions, sans plus de présence, ne sont presque rien. Mais cette ultime trace un peu vaine que se plaît à reconstituer l'artiste se remet à parler. Le langage est expressif, que pourrait-il dire de plus, que ce que l'on ne cesse de répéter: l'amour. Et l'amour Hardcore aime à hurler "sers toi de tout, ne gâche rien". »
Aurélie Gatle
Fragile résistance, 2021 (extrait)